Pour ceux qui préfèrent le format vidéo, c’est par ici.
Dans la série “Un autre Web”1, je m’étais intéressé aux dérives qui touchent actuellement le Web (polarisation, monopoles, promotion algorithmique de contenus suscitant l’indignation et la colère) ainsi qu’aux solutions structurelles que nous devrions entreprendre pour le modifier.
Allan, 93 ans et pilier d’ApresLaBiere, résumerait la situation ainsi :
En attendant que nous parvenions à transmuter le capitalisme en un autre système, bien évidemment prodigieusement meilleur, reste le problème égoïste qui se pose à chacun d’entre nous :
Comment survivre dans cette guerre où la première victime s’avère être notre bien le plus précieux : notre attention ?
Notre attention étant si précieuse, cet article permettra aux plus pressés d’en retirer la substantifique moelle le plus rapidement possible. Si vous voulez aller à votre essentiel, vous pouvez simplement lire le plan et vous précipiter vers la partie qui vous intéresse tout particulièrement.
Avant que vous ne vous précipitiez dans la partie “Solutions” tel un poilu aveugle mitraillant sa propre tranchée, Allan veux dire quelque chose dont nous devons tous prendre conscience avant de partir au combat :
I) Deux choses à toujours garder à l’esprit
A) Votre attention est l’objet d’une guerre
Allan n’est pas métaphorique. Oui, il y a littéralement une guerre économique pour parvenir à créer les outils qui captent au mieux l’attention humaine. Des milliards et des milliards sont investis tous les ans dans le développement de technologies contre lesquelles notre cerveau d’Homo Sapiens n’est pas armé.
Et vu les quantités de temps dont on parle, oui, il en va littéralement de notre VIE : 6 heures de chacune de nos journées2 représentent l’équivalent de 25 ans de notre vie éveillée passé à (ou bien “à nous”) tapoter derrière un écran. Pour celles et ceux qui se disent que c’est génial et que c’est finalement tout ce à quoi ils aspiraient quand plus jeune, ils rêvaient à leur vie d’adultes, je suis sincèrement content pour vous. L’article ne vous est donc pas forcément destiné mais n’hésitez pas à le partager à vos amis qui, contrairement à vous, subissent la situation.
Mais avant de spammer tous vos amis distraits et de partir le cœur léger, êtes vous si certain d’être satisfait de votre rapport aux écrans ? Prenons 30 secondes pour y réfléchir sérieusement.
Tout d’abord, combien de temps passez-vous sur des plateformes dont l’objectif concret est de vous y attirer ?
Ensuite, quand vous êtes sur ces plateformes, quelle est l’intensité de votre sentiment de perdre votre temps ou de vous le faire voler ?
En associant ces deux axes et votre position sur chacun d’eux, nous obtenons une matrice dans laquelle vous pourrez alors vous positionner :
Où êtes-vous ?
Dans la case 2 ? Cet article est fait pour vous et vous le savez déjà.
Vous êtes dans la case 1, 3 ou 4, relativement content de votre positionnement ? Demandez vous quand même s’il ne s’agit-il pas d’un positionnement de “complaisance”. Vous savez, le même genre que lorsqu’on annonce fièrement qu’on est flexitarien – “presque” végétarien même – puisqu’on n’achète jamais de viande. Effet d’annonce explosant en plein vol lorsqu’on nous rappelle dans la foulée qu’on tourne à un bobun boeuf tous les deux jours.
Connaissez-vous le temps que vous passez “réellement” sur ces plateformes ? Quand on le réalise, on se téléporte parfois de la case 4 à la case 2 :
Et puis, connaissez-vous vraiment les stratégies employées pour nous manipuler3 ? Quand on comprend à quel point nous ne sommes finalement que des marionnettes, on peut cette fois passer de la case 1 à … la case 2.
Première chose à faire si vous vous retrouvez dans la case 2 : réaliser et intégrer qu’il s’agit d’une guerre. Et comme n’importe quelle guerre :
Une fois cela réalisé, on prend acte et on agit !
Mais avant de partir, la fleur au fusil à la conquête de notre concentration perdue, il nous faut comprendre la deuxième partie de la mise en garde d’Allan :
B) Vous n’avez (quasiment) aucun libre arbitre
Même si nous ne sommes pas spinozistes et que nous voulons continuer à croire en notre libre arbitre, admettons au moins que pour les GAFAMs qui nous connaissent mieux que nos parents, c’est en tous les cas tout comme si nous n’en avions pas. Nous avons à peu près autant de libre arbitre face aux différents réseaux sociaux qu’un joueur de casino compulsif devant une roulette à Las Vegas.
Comme les personnes qui se pensent à l’abri des publicités et du marketing, se croire indifférent aux stratégies des GAFAMs, c’est se croire au-dessus de la mêlée humaine. C’est à la fois prétentieux ET stupide. Que ça nous plaise ou non, nous sommes extrêmement semblables. Nous constituons ensemble cette population qui aime à déclarer qu’elle adore Arte tout en restant scotchée à BFM au moindre accident de trottinette.
Par quel miracle sommes-nous tous devenus “passionnés de séries” ces 10 dernières années au point que c’est devenu quelque chose qu’on affiche désormais sur un CV ? Est-ce là l’expression de nos libres arbitres respectifs curieusement synchronisés dans un mouvement allant dans des directions favorables aux GAFAMs ?
Beaucoup plus d’argent est investi par les GAFAMs chaque année pour hacker notre libre arbitre que nous passons d’énergie et de temps chaque année à entraîner notre volonté et notre capacité de résistance à la distraction. Il ne faut par conséquent pas s’étonner si au global, toutes plateformes confondues, nous perdons du terrain.
Alors oui, il y en a toujours pour entretenir le mythe de la “mesure” et de la consommation “raisonnée” tel un membre du service marketing de Malboro :
Mais soyons honnêtes 30 secondes, passerions-nous en moyenne 25 ans de notre vie éveillée devant un écran si nous étions “mesurés” ? Regardez vos statistiques de “Temps d’écran”, ça peut au moins aider à reconnaître que notre libre arbitre est étrangement “pro GAFAM”…
Ceci étant dit, il est grand temps de s’activer, et pas qu’un peu !
II) Ce que vous pouvez concrètement faire
Alors je vais proposer des armes qui peuvent paraître radicales mais personnellement je n’ai jamais acheté la “fable” de David contre Goliath. Même les courageux afghans des années 80 n’ont commencé à renverser la situation qu’une fois quelques armes livrées par les américains. David se débrouille mieux face aux hélicos russes avec des missiles Stinger4.
En ce qui concerne les armes de destruction massive de papillonnage numérique, il y’a pour moi deux grandes stratégies à utiliser sans aucune modération :
- Stratégie 1 : transformer son environnement afin de minimiser les distractions qui en émanent
- Stratégie 2 : se transformer pour devenir de plus en plus insensibles aux distractions et de plus en plus capables de concentration.
Dans les méthodes pour retrouver un peu de concentration dans un monde d’infinies distractions, certains pensent qu’il est ridicule de vouloir modifier son environnement pour éviter la distraction :
“Non mais en arriver, à utiliser des applications pour bloquer d’autres applications, c’est ridicule ! Ça ne traite absolument pas le problème à la source !”
Mais la source de quoi exactement ? Comment traiter à la source l’immense problème d’être … un animal humain, réagissant aux bruits, à la couleur, au sucre et au gras ?
Ces deux stratégies sont au contraire complémentaires car elles cherchent toutes les deux à résoudre le cercle vicieux de notre distraction permanente par un bout différent :
Une stratégie n’empêche pas l’autre, au contraire. Vouloir uniquement appliquer la seconde, c’est comme penser qu’on n’aurait pas besoin de ceinture de sécurité au motif que le plus important, c’est de bien conduire.
Surtout que si on file la métaphore, notre attention circule sur un réseau routier où le moindre véhicule file à 240 km/h et où la conduite n’est absolument pas soumise à l’obtention préalable d’un permis.
Alors oui, il serait plus “noble” de rester stoïquement concentré, imperturbable malgré le mitraillage de notifications alléchantes, tel le penseur de Rodin de l’âge numérique. Mais soyons honnêtes, on sent tous bien que notre capacité d’attention évolue davantage vers celle d’un poisson rouge que vers celle d’un Kasparov. Dans une telle situation d’urgence, il pourrait être malin de s’attaquer au problème I et de s’autoriser le déminage de nos champs attentionnels.
A) Stratégie 1 : Transformer son environnement de travail pour qu’il soit propice à la concentration
Nous sommes dans un tel état de sollicitations permanentes que non seulement nous utilisons des applications qui pour capter notre attention utilisent des méthodes de plus en plus intrusives mais nous devenons dans le même temps tellement dépendants à la distraction que nous allons proactivement la chercher quand ce n’est pas elle qui vient à nous.
Le problème 1 se divise donc en deux sous-problèmes nécessitant deux approches différentes.
Approche 1 : empêcher les trous noirs attentionnels de nous atteindre
Pour ce faire, vous pouvez par exemple :
1) Installer des plugins qui modifient les sites Web ou les plateforme et les rendent moins addictifs
Le plugin “Inbox when ready”5 pour gmail vous permet par exemple d’écrire des emails sans avoir tous les autres emails dans l’arrière plant hurlant “tu m’as pas traité” ou “je viens d’arriver, je suis surement bien plus intéressant que ce que tu es en train de faire, ouvre-moi !”. Par défault vous n’avez que la superbe photo du thème que vous n’aviez d’ailleurs encore jamais vu :
Le plugin “unhook”6 vous permet quant à lui de configurer youtube “à votre sauce” :
Ce qui donne un youtube étonnamment Zen :
2) Prendre l’habitude de fermer les applications et les onglets lanceurs de notifications.
3) Supprimer toutes les notifications
Pour une démarche graduelle, vous pouvez commencer par supprimer les notifications non-humaines, celles où Facebook vous prévient que tel événement où tel ami s’est inscrit pourrait vous intéresser ou bien l’application d’actualités qui vient donner les résultats d’un sondage pour un second tour présidentiel entre Hanouna et Lionel Messi. Tant qu’a y être, vous pouvez franchement supprimer toutes les notifications, il vous suffit de checker toutes les heures, c’est amplement suffisant pour la plupart des mortels.
Approche 2 : Se restreindre soi-même d’accéder aux trous noirs attentionnels
En lisant certaines des douze techniques à suivre, certains auront envie de dire :
A ça, Allan nous répondrait :
1) Avoir toujours sur soi de quoi noter
Il faut toujours avoir à côté de soi un petit bout de papier, un cahier (je t’ai déjà parlé du bullet journal7 ?) ou bien un fichier texte où on notera toutes les choses auxquelles on pense et qui ne sont finalement que les symptômes de notre propre envie de distraction. Quand nous allons nous mettre à travailler “sérieusement”, toutes les activités, même chiantes, se transforment instantanément en “distractions irrésistibles”. C’est pour cette raison que c’est lorsqu’on se met à travailler sérieusement qu’on se souvient qu’il nous faut absolument :
- envoyer ce petit message à Jacques pour caler l’endroit de rendez-vous
- vérifier la météo pour savoir si je courrai plutôt le matin ou le soir
- acheter ce billet de train pour la semaine prochaine car sait-on jamais que les prix triplent pile poil pendant ma session de travail de 60 minutes.
2) Mettre votre téléphone en noir et blanc
Vous ne croyez pas que ça change quelque chose ? Essayez et vous verrez que la capacité hypnotique de vos écrans chute proportionnellement au nombre de couleurs. Autre test rapide : tendez une tablette en noir et blanc à vos enfants. C’est à croire que nous constituions une espèce humaine différente lorsque, dans les années 80, la game boy fit des ravages.
3) Utiliser sans compter les applications “bloquantes”
Et non, nous ne sommes pas tout seuls à nous battre contre nous-mêmes et parmi nous il y a les développeurs des applications suivantes :
Cold Turkey8 : une application qui bloque des listes que vous configurerez vous-mêmes pour contenir tous les trous noirs attentionnels auxquels vous êtes particulièrement sensible. Pour avoir accès à l’option “emploi du temps” où vous configurez à l’avance les plages horaires où vous serez “bloqué”, il faudra débourser 35 dollars pour une licence à vie.
Pluckeye9 : c’est celui que j’utilise désormais car j’en préfère la logique. Ce plugin met en avant la partie “éclairée” de vous-même10, celle qui “sait” ce qui est vraiment bon pour vous, en introduisant la notion de délai. Vous introduisez vous-même un délai entre le moment où vous choisirez de “débloquer” un site et le moment où il pourra s’afficher. Ainsi si vous mettez un délai de 5 secondes sur un site, au moment où vous choisirez d’aller sur ce site, il vous faudra attendre 5 secondes avant de pouvoir l’afficher. Ca marche bien entendu également avec 5 minutes ou 5 heures. C’est un excellent moyen de mettre votre moi long terme aux manettes de votre navigation.
Qu’importe le plugin tant que vous en trouvez un qui vous convient et tant que la recherche du plugin parfait ne devient pas la nouvelle source de votre procrastination, #jeVousVois. Sur google, les mots clés pour faire votre choix : “website blockers”
4) Désinstaller toutes les applications dangereuses de votre smartphone
Forcément, si vous ne marchez pas en permanence avec le diable dans la poche, vous aurez moins de chance de pactiser avec lui. Lors d’un point avec vous-même, armé du bilan hebdomadaire du temps passé sur votre smartphone, supprimez toutes les applications sur lesquelles vous semblez passer trop de temps. De bons candidats à la suppression sont : Facebook, Twitter, Linkedin, Tiktok, Instagram, Candy Crush…
5) Ne pas connaître ses mots de passe de réseau sociaux
Forcément, si vous n’avez plus les applis mais que vous connaissez vos mots de passe par coeur, vous ne serez pas à l’abri d’aller checker Twitter en loosdé sur le site Web de la plateforme. Ne pas connaître par coeur ses mots de passe est un moyen radical de se prémunir de cette tentation. Vous pouvez pour générer des mots de passe aussi “safe” qu’ “immémorisable” utiliser un logiciel tel KeePass
6) Prendre l’habitude de mettre son téléphone hors données cellulaires & hors WIFI
C’est bête mais on a souvent peur de se mettre en “mode avion” parce que “Imagine s’il arrive une catastrophe et que je suis pas joignable ???”, comme si on n’était contacté pour un tsunami ravageur tous les quatre matins. Pour vous prémunir du stress intolérable de la déconnexion totale, il suffit de se mettre hors d’atteinte de la donnée internet, ça devrait déjà couper 98% des potentielles distractions.
7) Prendre l’habitude de télécharger
Souvent, lorsqu’on tente de se déconnecter, on se sent bien et puis on a envie de faire quelque chose qui nécessite de la connexion, par exemple “écouter de la musique”. Pour quelqu’un qui, comme moi, n’écoute de la musique qu’en ligne, écouter de la musique et être en ligne se confondent. Alors pour éviter ce genre de scénario où on se retrouve à “devoir” se connecter alors qu’on commençait justement à se sentir bien :
- Téléchargez quelques unes de vos playlists préférés, surtout celles nécessaire à votre concentration
- Téléchargez les podcasts qui vous intéressent
- Téléchargez les vidéos youtube / dailymotion11 qui vous intéressent. Ca vous permettra par la même occasion de ne regarder que la vidéo que vous vouliez regarder, sans vous faire happer par les propositions sournoises des plateformes
8) Prendre appui sur le “reset” de la nuit
La nuit opère souvent comme un “reset” sur lequel on peut prendre appui pour se déconnecter plus longtemps.
En effet, il est plus facile de retarder le moment de sa première connexion d’une heure que de se déconnecter une heure en plein milieu d’une journée connectée. Lorsque vous mettez votre téléphone en mode avion avant de vous coucher, désactivez les données cellulaires et le Wifi (pour l’iphone, il faut le faire depuis les réglages pour que ça fonctionne) avant d’activer le mode avion. Ainsi lorsque le lendemain matin, vous sortez du mode avion à l’heure où vous estimez que vous devez commencer à être joignable sur le “téléphone classique”, vous pouvez continuer à être “hors ligne de la donnée”, chemin que prend 98% de la distraction environ.
9) Vous couper activement et temporairement de toute connexion internet
Pour couper le cordon, plusieurs stratégies s’offrent à vous. Par exemple :
- Débrancher votre routeur ou bien le programmer pour se couper sur certaines plages horaires.
- Se mettre dans des situations sans connexion :
- Prendre simplement des feuilles et un stylo et se poser dans un café
- travailler sur une table dehors, dans un parc sans connexion internet et en laissant votre téléphone en mode avion ou bien chez vous
Et sinon, il restera toujours l’annihilation pure et simple de l’origine des distractions :
10) Organiser vos espaces de vie
Comme des poissons dans l’eau, nous ne nous rendons même plus compte à quel point nos lieux de vie maximisent les chances de se retrouver à scroller à l’insu de notre plein gré. Pour sortir la tête de l’eau, vous pouvez :
- Acheter un réveil pour vous réveiller avec autre chose que votre smartphone dangereusement connecté
- Faire une station de chargage en dehors de votre chambre.
11) Réfléchir avant de vous inscrire
Posez vous sincèrement la question de la balance “bénéfice / risque” de toute nouvelle plateforme. Il est plus facile de ne pas commencer à utiliser certains services que d’arrêter de les utiliser. Je ne pense absolument pas ici à Netflix ou Tiktok.
12) Vous connecter à internet (à fortiori aux réseaux sociaux) uniquement si vous avez une intention précise
Quelques comportements que vous pouvez essayer d’adopter et qui vont dans ce sens :
- Conditionner le fait de vous connecter avec le fait d’écrire dans un journal de bord votre intention.
- Repérer les moments où vous allez, par réflexe, sortir votre téléphone et vous “brancher” au premier flux de distractions venu, typiquement : les files d’attente, la grosse commission ou le “coma” d’après footing. Pour ces moments, demandez-vous : est-ce que je ne voudrais pas trouver une autre distraction que le “scroll automatique” sur les reels d’Insta ?
- Si oui : trouvez cette autre distraction et faites en sorte qu’elle soit logistiquement plus pratique que la distraction par défaut sur votre smartphone.
- Si non : enjoy Insta et Candy crush my friend !
Personnellement, l’application d’apprentissage de langue “Duo Lingo”12 me sauve pas mal la mise en remplaçant mes vérifications compulsives de google actualités par des petits sprints d’apprentissage germanique.
Je mettrai à jour cet article avec d’autres stratégies au fur et à mesure donc n’hésitez pas à me donner vos stratégies. Ces stratégies peuvent transformer radicalement nos environnements pour qu’ils soient davantage propices au travail en profondeur.
Comme on l’a dit précédemment, notre distraction permanente est entretenue par un cercle vicieux (autrement appelé, boucle de rétroaction positive à conséquences négatives) qu’il nous faut attaquer par ses deux bouts. Attaquer le second bout consistera ainsi à répondre à la question suivante :
“Comment faire pour plonger dans le “flow” de sa concentration avec la même aisance que Jean Reno dans l’Océan du grand Bleu ?”
B) Stratégie 2 : Outils pour se transformer et devenir soi-même propice à la concentration
C’est très bête mais comme toute compétence, ça s’apprend et ça s’entraîne. Un instituteur disant à un enfant “mais concentre-toi” est aussi bête qu’un entraîneur d’athlétisme disant à ses protégés “plus vite, bande de moules”.
Qu’il s’agisse de méditation ou bien d’exercices de concentration, entrainons nos cerveaux à rester concentrés sur une tâche donnée pendant un temps donné. Qu’il s’agisse de remplir une grille de Sudoku, de lire un livre complexe ou bien d’écrire un email structuré, faites le en ayant à l’esprit qu’il s’agit également d’un exercice de concentration vous permettant de travailler cette compétence stratégique. Ainsi il peut être intéressant de noter consciemment le temps durant lequel vous voulez rester absolument concentré à chaque fois que vous vous lancez dans une activité cognitivement exigeante (lecture d’un livre ou d’un article, écriture d’un email, mot croisés, etc).
Un autre moyen de renforcer sa puissance de concentration, pratique et disponible à tout moment, c’est de résister “un peu” à chaque fois qu’une distraction vous “attaque” :
Faire ça à chaque fois qu’on est sur le point de succomber à la tentation, c’est l’équivalent de faire 10 pompes à chaque fois qu’on ouvre le frigo. L’air de rien, avec cette méthode, on finit solide (ou rachitique).
III) Comment se concentrer “durablement”
C’est l’éternelle question, on prend un problème à bras le corps, on change quelques jours et puis… on replonge. On a beau être plutôt satisfaits du changement, on retombe quand même dans nos vieilles routines de déconcentration. C’est mon cas. Je bataille sans cesse avec ma concentration depuis 25 ans et je finis toujours par trouver de nouvelles manières de me déconcentrer mais je les repère et j’en prends conscience un petit peu plus rapidement. Je suis toujours distrait mais ça aurait largement pu être pire…
Et c’est bien ça qui importe, il n’y a pas d’objectif de concentration absolue qu’il nous faudrait atteindre. Il s’agit simplement d’améliorer continuellement notre capacité à donner notre pleine attention à ce qui importe vraiment. Il s’agit d’un marathon qui dure toute une vie et pour tenir la longueur, j’ai deux conseils :
A) Ne jamais désespérer et toujours mettre à jour ses méthodes
Cela fait bien 30 ans que j’ai découvert chez moi cette compétence particulière à être immensément intéressé par toutes les activités possibles sauf celle que je pense qu’il faudrait que je fasse. Un papier à rendre urgemment et me voilà parti dans une folle session de ménage qui me tend pourtant les bras depuis des semaines sans que je n’y prête attention. Cela fait 30 ans que je me bats en permanence contre cet instinct qui veut absolument me faire mourir soit d’une indigestion de bobun, soit de fatigue après 4 jours de visionnage ininterrompu d’animé japonais. Et en 30 ans, ce que j’ai appris c’est que lorsqu’on chasse le naturel, il revient effectivement au galop.
Quand le contexte technique et algorithmique dope tous les jours davantage le cheval de notre déconcentration, ça n’arrange pas nos affaires.
Il n’y a pas à s’en vouloir de ces éternelles rechutes, il faut plutôt arrêter de penser qu’il est possible de chasser ce naturel définitivement. Embrassons l’idée que toute notre vie durant, nous essaierons de nous dompter.
Petit à petit, on parvient, non pas à le changer (ce fameux “naturel”) mais à le cadrer un peu plus afin de le faire galoper dans des directions et d’une manière qui correspond un peu plus à ce qui nous satisfait dans le long terme.
B) Créer des routines de concentration
Si on veut devenir fort à quoique ce soit, il est évident qu’il faut le faire tous les jours comme le disait si bien Jacques Brel.
Il ne faut pas avoir à se poser la question tous les jours de si oui ou non on devra se concentrer intensément. La réponse est évidente :
“Bien sûr que je vais me concentrer intensément, comme tous les jours”.
Si l’idée de développer de “bonnes” routines vous intéresse, n’hésitez pas à lire l’article où j’ai tenté de résumer l’approche développée par James Clear dans son très bon “Atomic Habits” :
- La puissance insondable des habitudes et comment la maîtriser ?Nous avons tous envie de mettre en place de bonnes habitudes. Comment faire ? Comment mettre toutes les chances de notre côté afin de les pérenniser ? Les 4 lois des habitudes de James Clear nous y aident énormément et c’est précisément de ça dont nous allons parler !
La concentration et le travail profond doivent être nos (bons) choix par défaut. Dans l’idéal, tous les jours, de telle heure à telle heure, nous sommes en train de “travailler profondément”. Plus largement, s’habituer à travailler profondément, c’est s’entrainer à mettre de la profondeur dans toutes nos activités et ça n’est peut-être qu’une manière de mettre davantage d’intensité dans des vies bien trop brèves.
Pace é Saluté,
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License CC-BY-SA
Notes :
- Les trois articles de la série sont disponibles là sur le blog ApresLaBiere
- Voir cette effrayante et instructive infographie de OurWorldInData
- C’est le sujet de la série d’articles “Un autre Web ?” sur le blog ApresLaBiere et dont cet article est quelque part la conclusion “égoïste”
- Voir le deuxième épisode de la série de 4 documentaires “Afghanistan, pays meurtri par la guerre”
- Plugin Inbox when ready disponible là
- Plugin unhook disponible là
- L’article où j’en parle : “Comment s’organiser grâce au bullet journal ?“
- Site de l’application coldTurkey
- Site du plugin PluckEye
- J’avais déjà parlé de cette partie “éclairée” dans un article : “Lequel de mes deux “moi” devrais-je écouter et rendre heureux ?“
- Une application qui fait ça très bien : 4k video downloader
- Site de cette application vraiment gratuite et vraiment pas mal, voire efficace
Merci pour ce long et riche billet.
Ma dégafamisation est entamée depuis qq années, et je vois à quel point c’est difficile alors même que je pense me connaitre un peu et maitriser une bonne partie des outils hors GAFAM.
Là, je viens de rédiger une note à mon attention avec ce billet en lien en utilisant #logseq un outil qui devrait vous intéresser si vous ne connaissez pas déjà.